La variété qu'on ne trouvera pas (tête bêche case 5) (attention il s'agit d'un montage !)
Article
paru dans : Les annales de
philatélie Volume II 1936/38 pages 184 et suivantes Consultable sur : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9676615k/f196.image.r=jeanne
Le timbre « Jeanne
d'Arc » et ses variétés par V.
BOURSELET. (1) Conférence
faite à la réunion du « Caducée philatélique » le 9 févier 1937. Certains parmi vous
seront peut-être surpris de me voir aborder un sujet qui n'entre pas dans le
cadre de celui qui m'est cher et auquel je m'adonne depuis près de trente ans,
je veux dire : l'étude des marques et oblitérations postales. Çà et là des travaux sur les timbres ou l'histoire postale
m'ont conduit à faire des incursions dans le domaine du voisin, la faute me
direz-vous n'est pas grave, ce qui
est permis en médecine peut l'être également en philatélie. Mais ici la
gravité s'accentue c'est qu'en effet j'entre franchement dans une spécialité
où je me sens mal à l'aise à côté de ces chercheurs infatigables que l'on
nomme les « reconstructeurs de planches. Vous l'avez deviné; il s'agit de variétés.
L'acquisition toute fortuite d'un lot de timbres au type Jeanne
d'Arc m'a amené à en rechercher
les variétés: elles sont assez nombreuses comme vous allez le voir et je fus
incité ainsi à entreprendre une ébauche de classification laissant à ceux
que la question intéresse, le soin de retrouver l'emplacement occupé par
chaque variété dans la planche d'impression. Ces préliminaires posés. il
nous semble que des considérations générales sur le timbre dit de « JEANNE
D'ARC » auront votre agrément avant d'aborder la partie spéciale
concernant les minuties. Le spirituel académicien Emile Faguet a publié en 1903
(voir historique), un
ensemble de critiques du sujet représenté sur nos timbres; il fit le procès
de « Cérès » des types Sage et Droits de l'Homme, par contre il
louangeait la Semeuse élégante et « distinguée » et trouvait ridicule
les attaques dont elle était l'objet dans le but de la faire disparaître de
nos timbres. Cependant disait Faguet, si la dissémination de la Semeuse est décidée,
il faut quelque chose d'aussi charmant pour ne pas regretter l'œuvre de Roty.
« On dit que sur les timbres, comme sur les monnaies. « il faut une tête qui
s'encadre bien dans la circonférence « de la pièce de monnaie et dans le
rectangle du timbre- poste. Au fond, c'est assez mon avis, je proposerai une «
tête et une belle tête, et une tête qui peut rester longtemps à notre tète
et avec-laquelle nous ne trouverons « pas désagréable de rester tête à tête.
Il y a longtemps « que j'y songe. Je proposerai la tête de JEANNE. D'ARC.
Cette idée de sujet déjà préconisée par Thomas Grimm et d'autres vit
le jour de mars 1929 au 30 septembre suivant à l'occasion du cinquième
centenaire de la levée du siège d'Orléans, sur les vignettes de la valeur de
cinquante centimes, mais sous un aspect bien différent de celui conçu par
Faguet qui voyait une Jeanne d'Arc casquée avec le haut du buste cuirassé. La
maquette représentant la Pucelle à cheval, que nous décrit M. L Demoulin dans
son ouvrage sur les timbres-poste français, fit honneur au dessinateur
Barlangue et au graveur Mignon qui a fait consciencieusement ce qu'il a pu mais
« pouvait-il réellement en gravure typographique et dans un format aussi réduit,
obtenir mieux ? Cependant, il faut reconnaître sans attaquer la valeur
artistique du sujet que sa composition trop chargée ne s'adaptait pas au but
pour lequel il était destiné et ce qui est pis encore c'est que le procédé
d'impression en a fait une œuvre des plus médiocres. Mais si le philatéliste
est en contemplation devant les timbres de parfaite exécution, il est parfois
aussi l'ami des laideurs dont nous gratifie trop souvent l'Administration; elles
sont pour lui une source de recherches qui aboutissent à la découverte de variétés.
C'est de celles-ci que nous nous occuperons sur un timbre que la teinte et la
valeur courante d'affranchissement peuvent appeler à juste titre à figurer
parmi les « Bleus de France ». En philatélie la description des variétés porte 1° sur le papier employé à la confection des timbres, 2° sur la dentelure. 3° sur l'impression. A) la couleur B) la déformation ou les pertes de substance des clichés. Papier. — C'est au
verso du timbre que l'on peut le mieux observer le papier. Celui du sujet de
notre étude est de couleur blanche mais le foulage de l'impression lui donne
parfois une teinte grisâtre qui augmente suivant l'intensité du bleu de la
vignette. De légères différences dans l'épaisseur du papier nous font voir
que les livraisons ne furent pas toujours semblables. Nous avons également
observé que sur certains timbres, là où le papier nous a paru le plus mince,
le toucher à la pulpe du doigt donnait une sensation de surface lisse presque
talquée. Ce sont là de bien petites variétés qu'il était bon de signaler
pour être complet sans toutefois s'y attarder plus longuement. A cette étude
sur le papier nous ajouterons une particularité que nous avons observée
concernant l'impression très nette du sujet au verso (Communiqué par M
Rappeti). L'explication en est simple : il s'agit d'un papier insuffisamment
collé que l'encre d'imprimerie a traversé. Dentelure.
— Le timbre au type « JEANNE D'ARC » est dentelé 14 X
13,5. Son piquage est le même pour les timbres débités en feuilles de 100 que
pour celles destinées à la confection des carnets. La seule variété que nous
avons se trouve être sur des
feuilles préparées pour carnets à réclame. Sur certains de ceux-ci, à la
rencontre de la dentelure verticale avec l'horizontale qui sépare les deux rangées
de timbres, la perforeuse mal ajustée a donné une dentelure irrégulière aux
douze lignes verticales du carnet. Impression.
A. La couleur. Celle-ci est bleue et
le catalogue Yvert de France et Colonies lui donne en sous-types les teintes de
bleu-gris et bleu foncé. Mais de quel bleu s'agit-il. Ici
nous abordons une question qui est à l'ordre du jour et que nous nous garderons
bien de discuter. En attendant l'adoption officielle d'une Charte ou d'un code
des couleurs, nous dirons que nous avons obtenu les trois teintes citées : 1° le bleu en atténuant le bleu de Prusse par de la terre de
sienne diluée. 2° le bleu gris en mélangeant du bleu de cobalt, du
vermillon et de la terre de sienne. 3° le bleu foncé en modifiant l'outremer foncé par de la
garance. Mais tout ceci est un peu arbitraire et seule une comparaison
avec un atlas de couleurs et la nomenclature correspondante nous donnera le nom
exact de la teinte de nos timbres B. Déformations ou
perte de substance des clichés. —Dans le cartouche rectangulaire situé
à la partie supérieure du timbre, nous voyons que les mots Postes, France sont
formés par des lettres blanches sur fond ligné. Ces lettres sont plus ou moins
régulières, il en est deux l'A et l'N du mot France qui sont plus petites que
les autres. Cette différence très visible, se rencontre sur les timbres de
bonne ou mauvaise impression; il n'y a donc pas lieu de voir là une altération
du cliché mais un manque de régularité dans le dessin des lettres. Pendant le tirage, la plupart des lettres des mots Postes.
France ont été victimes d'accidents. La première, le P se rencontre avec un
jambage qui s'arrête à la dernière ligne horizontale du cartouche alors qu'à
l'ordinaire il ne dépasse pas la sixième ligne. Cette lettre qui se présente
parfois avec la partie inférieure sous forme de tâche blanche a dû subir une
légère déformation et c'est sa retouche au burin qui semble nous avoir donné
le P allongé que nous venons de citer (1). L'0 du mot Postes, plutôt rectangulaire qu'ovale dans sa
forme normale, se présente sur certains exemplaires avec une barre dans son
angle inférieur gauche, ce qui lui donne l'aspect de la lettre Q (2). Dans
d'autres cas, l'intérieur de la lettre O au lieu d’être traversé par les
trois traits du fond ligné du cartouche a ces trois traits réunis sous forme
de tâche blanche (3). Le premier S de Postes et le T qui suit ne paraissent pas
avoir été mutilés au point de retenir notre attention; il en est de même de
l'E qui se présente normalement sous la forme d'un P, la tête de la Sainte
venant recouvrir sa barre inférieure. La dernière lettre a elle aussi, subi
quelques déformations au point de lui donner un peu de ressemblance avec un S
gothique. Dans un des cas, la base de l'S se prolonge jusque sur le front de l'héroïne
(4). Nous passerons rapidement sur le point qui sépare les deux mots du haut de
notre vignette et qui se transforme en virgule à pointe dirigée dans des sens
différents (5). Le mot France a aussi ses petites variétés. D'abord l'F a été
vu avec sa barre supérieure relevée ou abaissée à son extrémité (6). Dans
l'R l'œillet de la boucle non teinté en partie (7) donne l'illusion que le
jambage en diagonale remonte jusqu'en haut de la lettre. L'A trop petit de
naissance semble vouloir se grandir en prolongeant tantôt sa jambe droite tantôt
sa jambe gauche (8). Sa barre transversale n'est pas toujours horizontale (9).
On le rencontre séparé de sa voisine de droite par une tache blanche à
hauteur variable (10). Cette voisine se trouve aussi bancale et dans cet étal
parait plus fantaisiste que déformée (11). Enfin pour les deux dernières
lettres nous dirons que le C a paru sous l'aspect d'un L (12) et qu'un grand défaut
blanc touche les bords libres de l’E dans les trois quarts de sa hauteur (13).
Le cartouche inférieur du timbre porte le libellé : 1429 Orléans 1929 en
lettres de couleur sur fond ligné comme l'est celui du haut. Les accidents
furent nombreux pour cette
inscription: En effet, on remarque que la date 1429, présente le chiffre 4 plus
petit que les chiffres qui l'accompagnent (14), on voit aussi le 2 de cette date
mutilé et présentant la tonne d'un I (15). L'autre date, elle aussi, montre
une variante curieuse dans le premier 9 transformé en 0 ce qui se lit 1029 pour
1929 (16). Le nom de la ville fortement atteint dans la plupart de ses lettres
se trouve sous les aspects suivants : OPLEANS- OKLEANS - OFLEANS - ORLFANS
–OXLEANS -ORLCEANS - ORIEANS (17 à 23). L’0 non plus, n'a pas été épargné; très souvent
incomplet dans sa courbe, il ressemble tantôt à un U. tantôt à un C droit ou
retourné et quelquefois à un fer à cheval (24). Le sujet principal du timbre
JEANNE D'ARC sur son cheval, n’offre rien de bien particulier, cela peut
sembler bizarre à côté des nombreux petits défauts que nous venons de
signaler. Il y a çà et là quelques points bleus sur des endroits à
demi-teinte, une tache avec auréole sous les mains de la Pucelle. ou bien
encore l'absence de continuité dans les lignes du fond donnant ainsi un peu de
clarté aux épreuves de mauvaise impression. Il nous reste à voir le cartouche
qui contient les chiffres représentant la valeur d'affranchissement du timbre.
Le chiffre 5 a été trouvé beaucoup plus frêle que dans le type normal, c'est
le 5 maigre (25). Dans d'autres cas il présente une boule blanche reliant la
barre supérieure du chiffre à sa boucle (26) mais le plus remarquable c'est
que les timbres sur lesquels nous avons relevé ce défaut en présentent un
autre semblable au-dessous de l'angle inférieur gauche de l'écusson qui
contient les initiales de République Française (27). Quant au zéro, un petit trait blanc le traverse dans son
tiers supérieur; sur d'autres pièces un trait de même genre le sépare du
chiffre précédent (28 et 29). Poussons la minutie jusqu'à vous dire que le C. initiale de
centimes, bien que petit, a lui quelques variétés on le voit cassé ne formant
plus qu'un quart de cercle ou bien alors complètement fermé et nous lisons 50
degrés ! (30). Là, mes chers Collègues je termine car vraiment j'étais
loin de penser au début de cette étude que ces recherches sur un petit morceau
de papier me mèneraient à cette température !
|